EVARS : démêler le vrai du faux
L’Éducation à la Vie Affective, Relationnelle et Sexuelle (EVARS), dont les programmes devraient être publiés en janvier, suscite encore trop de malentendus, d’inquiétudes et de campagnes radicales de désinformations. Pourtant, elle s’inscrit dans un cadre légal précis, autour de trois séances annuelles, et vise avant tout à protéger et éduquer les enfants de manière adaptée à leur âge. Décryptons les infox pour mieux comprendre l’importance de cette démarche éducative, essentielle pour le bien-être et l’émancipation des enfants et pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.
Pour se mettre dans le bain :
L’EVARS enfreint les lois et conventions ?
FAUX !
Les affirmations selon lesquelles l’EVARS serait contraire au Code Pénal ou au Code Civil ou bien à la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) relèvent de l’intox. Le Code Pénal n’a aucun lien avec cette question et le recours à cette référence juridique est dénué de tout fondement argumentatif.
Au contraire, la CIDE souligne des principes qui soutiennent pleinement l’éducation affective et sexuelle. Elle stipule que chaque enfant a le droit d’être protégé·e « contre toute forme de violence, […] y compris la violence sexuelle » (art. 19 et 34). Elle garantit également leur droit à « jouir du meilleur état de santé possible » (art. 24), ce qui inclut des mesures éducatives adaptées. Enfin, la CIDE promeut l’égalité des sexes et encourage la préparation des enfants à leur rôle futur dans une société libre (art. 28), tout en reconnaissant leur droit à l’expression et à la prise en compte de leurs opinions en fonction de leur maturité (art. 12).
Quant au Code Civil, il stipule que les parents ne peuvent « invoquer leurs convictions pour refuser à un enfant le droit à l’instruction », incluant les cours d’éducation affective et sexuelle. De plus, il précise que les circulaires encadrant l’enseignement à la sexualité « n’ont ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à l’exercice de l’autorité parentale » (Code Civil annoté 2025, p. 658). Les principes de cette éducation sont donc non seulement légitimes mais aussi protégés par la loi.
Les élèves vont apprendre à se masturber ?
FAUX !
À l’école primaire, les enfants vont apprendre à connaître et nommer les différentes parties de leur corps, y compris les parties intimes et les différences entre les sexes. Ces apprentissages visent à favoriser leur bonne santé, comprendre la notion d’intimité ainsi que les mots, les conduites et les gestes associés. Les notions abordées et les termes employés sont adaptés à l’âge et au développement des enfants. Ces savoirs contribuent à respecter son corps et celui des autres et à instaurer des relations saines et non-violentes.
L’EVARS traumatise les enfants en les exposant à des informations sexuelles inadaptées et à la pornographie ?
FAUX !
Au contraire, l’éducation affective, relationnelle et sexuelle est cruciale dans un contexte où, selon l’ARCOM (rapport 2023), les enfants sont exposés à des images pornographiques avant l’âge de 10 ans. À partir de 12 ans, plus de la moitié des garçons consultent des sites pornographiques chaque mois, et ce chiffre grimpe à deux tiers entre 16 et 17 ans. C’est d’abord et avant tout cette exposition qui constitue un traumatisme car les enfants n’ont pas les clés de compréhension pour appréhender la violence de ces images.
Par ailleurs, des études nord-américaines indiquent que la confrontation aux codes pornographiques amènerait les adolescents à considérer davantage les femmes comme des objets sexuels. L’EVARS vise justement à déconstruire ces impacts et à offrir d’autres représentations moins normées, plus égalitaires et non violentes de la sexualité.
L’éducation à la sexualité relève de la famille ?
VRAI/FAUX
La famille est bien sûr le premier espace d’apprentissage et de socialisation des enfants. Mais il est possible que les parents se sentent démunis ou mal à l’aise pour aborder les questions de relations amoureuses ou de sexualité avec leurs enfants. Et même si le sujet est évité, les enfants se poseront inévitablement des questions, parfois bien plus tôt que leurs parents ne l’imaginent.
Sans aller à l’encontre des convictions et de l’éducation des familles, l’école joue un rôle complémentaire essentiel. En tant que lieu fréquenté par la très grande majorité des enfants, elle garantit à toutes et tous des informations objectives, permettant aux adultes en devenir de faire librement leurs choix en matière de sexualité et de relations affectives.
De plus, la famille reste le premier lieu où s’exercent les violences faites aux enfants. L’école joue un rôle de prévention et de détection, auquel contribue la mise en œuvre de l’EVARS.
L’EVARS est une incitation à la sexualisation précoce des enfants ?
FAUX !
Au contraire, la circulaire de 2018 pointe l’importance d’une progressivité des connaissances et compétences enseignées sans mettre en danger les élèves : “À ce niveau d’âge, il ne s’agit pas d’une éducation explicite à la sexualité. Au regard des programmes d’enseignement, plusieurs thématiques peuvent constituer un objet d’étude, en prenant en compte l’âge des élèves”.
De même, le projet de programmes indique que la sexualité “requiert un degré de maturité et de responsabilité auquel il s’agit de préparer les élèves, très progressivement et en respectant leur rythme de développement”.
C’est l’absence d’éducation qui expose davantage les jeunes aux risques de sexualisation ou d’entrée dangereuse dans la sexualité. L’EVARS est une réelle prévention en permettant des espaces de paroles et des connaissances sur la sexualité mais aussi les relations et la vie affective.
L’EVARS promeut la « théorie du genre » ?
FAUX !
Il existe des travaux de recherche universitaire dans plusieurs domaines sur le genre, qui amènent donc des analyses et des publications, mais il ne s’agit pas d’une “théorie”.
La « théorie du genre » est un épouvantail agité régulièrement par des mouvements transphobes, sexistes et d’extrême droite. À l’école, il n’est pas question de brouiller les identités des enfants, ni évidemment de les encourager à changer de sexe. Les activités visent à déconstruire les stéréotypes filles-garçons pour ne pas enfermer les enfants dans des normes de genre. Il s’agit par exemple de ne pas réserver certains jeux aux filles, de ne pas interdire l’expression de ses sentiments aux garçons ou de réfléchir à l’occupation de la cour de récréation. L’EVARS participe ainsi à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes, conformément au principe constitutionnel (article 3 du Préambule de la Constitution de 1946).
L’EVARS va inciter les enfants à devenir homosexuels ?
FAUX !
L’école ne fait pas la promotion de l’homosexualité, qui n’est pas plus un choix que l’hétérosexualité ou la bisexualité. En revanche, elle veille à donner la place à toutes les familles comme à respecter les relations sexuelles ou amoureuses, quel que soit le sexe des partenaires, toujours en adaptant les contenus selon l’âge des enfants. L’EVARS contribue par ailleurs à donner des notions de droit. Or les injures, les diffamations, les violences ou les discriminations homophobes sont punies par la loi.
Cette éducation n’a aucune incidence sur l’orientation sexuelle des élèves. En revanche, elle contribue à lutter contre les harcèlements et les discriminations liées au sexe, au genre et aux orientations sexuelles et peut ainsi permettre d’éviter des tentatives de suicide. En effet, le harcèlement et les discriminations dont sont victimes les personnes homosexuelles ou bisexuelles accentuent les risques de suicides, en particulier chez les jeunes (Rapport Santé public France-2014).
L’EVARS repose sur des croyances non scientifiques ?
FAUX !
L’EVARS s’appuie sur des bases scientifiques solides, en particulier sur celles relayées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).
Ainsi, les recommandations de l’OMS sont le fruit d’études menées par plus de 8 000 professionnel·les qui comptent parmi les plus grandes expertes et experts mondiaux de la santé publique (médecins, épidémiologistes, scientifiques, administrateurs et administratrices). Les principes directeurs de l’UNESCO, reposent quant à eux sur les résultats de 22 revues et 77 essais attestés qui démontrent les effets positifs d’une mise en œuvre de l’EVARS sur la santé.
À l’inverse, les opposant·es à l’EVARS se réfèrent souvent à des sources pseudo-scientifiques ou militantes, parfois émises par des individus discrédités. Loin des fantasmes ou des infox, l’EVARS est une démarche rigoureuse, attentive au respect de l’intimité physique et psychique des élèves, pensée pour les protéger et les accompagner dans une construction de leur vie d’adulte libre et respectueuse de leurs singularités.
EVARS, une nécessité, des outils pour répondre
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